LE SILENCE d'ARTHEMISIA
La collusion silencieuse.
Dimanche 28 mars.
Il faisait encore froid malgré les fleurs, déjà, sur les arbres qui bordaient la place solitaire. Une petite fille ce matin en avait arrachées quelques unes, les plus humbles, les plus dociles, et les avait jetées dans les flaques. Quelques fois, l’enfant n’est pas beau.
Il traversa le grand green cube, le col relevé, l’écharpe enroulée trois fois autour du cou, l’œil plein de pluie. Il détestait cet espace inhospitalier, artificiellement brillant, muet. Cependant il marchait déjà depuis longtemps avec détermination, dans le désert mouillé. Il lui fallait avancer.
Néanmoins il sentit que le spectacle liquide l’appelait à une collusion. Contre qui ? Il l’ignorait.
Il sortit son appareil photo de son sac, et se pencha au dessus d’une nappe d’eau. Le miroir lui renvoya son mensonge couronné d’efflorescence.
Autoportrait.
Il savait que ce soir, sur l’ordinateur, il mettrait la photo à l’envers, la tête en bas, sa tête en bas. L’eau de la flaque l’avait trompé ; ce n’était pas lui qu’il avait vu, mais son reflet, inversé. Alors il ferait faire encore un demi tour à cette tête qui l’accompagnait tous les jours histoire de voir si elle le supportait.
Il sauta à pieds joints dans la flaque. Eut-elle mal ?
Il était déjà loin quand on entendit crier.
Une petite fille traversait la place.
©Arthémisia – mars 10
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