LES MAINS de BABETH
Les mains de l'artisan s'activent sans cesse.
Expertes en leur matière, elles recherchent le parfait.
Et sur le bout des doigts, ressentent l'infini.
Les mains de l'ouvrier, rudes et épaisses,
se chargent des besognes, pour le moins compliquées,
et transforment la matière avec dextérité.
Les mains du chef d'orchestre, nerveuses et inquiètes,
transportent dans les airs, la mélodie parfaite,
d'un compositeur inconnu, inspiré par la vie.
Les mains du musicien, fines et agiles,
glissant sur les cordes, comme des papillons,
entraînent avec elles, l'auditeur attentif.
Les mains de la mère, qui maintiennent la maison
dans l'ordre et la propreté, savent se faire caresses,
soulageant les chagrins de l'enfant en détresse.
Les mains des enfants, petites merveilles,
attrapent le ballon en écartant les doigts,
et se joignent en claquant pour exprimer leur joie.
Les mains de l'acrobate, puissantes mais subtiles,
mécanisme parfait, semblent se dédoubler,
pour la joie du badaud, joyeux et réceptif.
Les mains de l'amant, pareilles à des abeilles,
prospectent une à une, les fleurs de la passion
de sa maîtresse, fougueusement, mais avec prudence.
Les mains du tortionnaire, aiguisent leurs serres
sur des victimes innocentes qui ont baissé les bras.
Elles savourent avec haine, leur puissance meurtrière.
Et toutes ces mains coupées, dans des pays lointains,
parce qu'elles ont dérobé le bien de leur voisin,
qui n'ont plus d'existence, et qui pourrissent en terre.
Et ces mains au chômage, qui n'osent pas frapper
sur les portes fermées, peur de se faire jeter,
aimeraient retrouver un peu de compassion.
Toutes ces mains qui s'activent pour des corps ingrats,
devenues avec le temps, outils de précision,
et dont l'homme, sans y penser, se sert à outrance.
Et ces mains en colère qui cognent sur la table,
avec un poing serré qui résonne comme un gong,
pour manifester la rage de voir tant d'injustice.
Et toutes ces mains fourbues, qui moissonnent.
Et toutes ces mains cachées, qui braconnent.
Toutes ces mains expertes qui sont reconnaissables.
Celles des médecins qui pansent les blessures.
Celles des curés qui bénissent les âmes.
Toutes ces mains tendues qui se font impostures.
Et voilà mon poème transformé en prière.
Il faudrait des mains fortes pour retenir les rames
de ce bateau en dérive, au bord du précipice.
Babeth.
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