LA LECTURNE de BABETH
Il est vrai qu'en regardant le tableau,
la jeune fille blonde, par son attitude
peut faire penser à une aveugle...
Bien imaginé !
Un amour aveugle.
Depuis ma cécité,
je m'ennuie à mourir,
et je reste prostrée
dans ce fauteuil usé.
Toi, ma sœur adorée,
tu as la charité
de combler mes désirs,
d'oublier tes projets.
C'est moi qui suis l'aînée,
et pourtant maintenant,
c'est toi qui me protèges
de cet horrible piège,
m'offrant ton amitié
dans ce monde menaçant,
car mes jours sont si sombres,
et mes peurs en grand nombre.
Chaque jour tu me lis
quelques pages d'un roman.
Alors j'oublie le temps,
le carcan de mes nuits.
Tu me soulages un peu
du manque de mes yeux,
et j'oublie un instant
mon chagrin lancinant.
Toi, ma sœur bien aimée,
sans qui je passerais
mes jours à me morfondre,
et mes nuits à confondre,
pour qui je donnerais
ma vie sans hésiter,
comment te remercier
sans froisser ta fierté?
Quand du bout de mes doigts
je caresse tes joues,
pour exprimer la joie
qui s'échange entre nous,
je retrouve confiance
en ma pauvre existence,
sans admettre pourtant
que tu perdes ton temps.
Babeth.