PONT JAPONAIS de CLAUDIE
Il est jeté entre deux rives et la lumière distille ses couleurs veloutées dans la forêt végétale qui le protège des assauts du vent. Des écharpes enrobent de soie et de moire la surface de la source qu’il traverse. C’est un petit pont de bois torsadé à l’apparence éphémère et fragile. Un lieu de paix où l’on entend le bourdonnement des abeilles qui tournent autour des fleurs piquées dans la verdure. De longues palmes coulent lentement leurs ombres bienfaisantes en été. Si l’on se penche sur le parapet on peut voir des poissons aussi vifs que l’argent filer entre les pierres. C’est l’endroit où s’arrêtent les amoureux pour rêver. Et pourtant…
Une ancienne légende dit qu’une geisha s’est donné la mort sur ce pont il y a des siècles. Abandonnée par son amant, elle venait là confier sa peine. Et un soir, elle pleura tant que ses larmes qu’elles se transformèrent en torrent. Sa chevelure de jais aux reflets bleutés fut à l’origine de la forêt végétale et ses bras ondulèrent telles de grandes palmes. Les colliers et les bagues qu’elle jeta se cassèrent en mille éclats tout comme son cœur meurtri.
Depuis, le pont de bois et certains matins, si on prête bien l’oreille on peut entendre le bruit des sanglots qui se meurent dans chaque repli miroitant de l’eau.
Claudie